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dimanche 13 avril 2008

Villa Abdeltif

Villa Abdeltif au Hamma (Alger)

Découverte d’un système d’irrigation de l’époque ottomane


Construite au XVIIe siècle, la villa Abdeltif, située au Bois des Arcades, disposait de canaux qui irriguaient ses jardins.

Un système d’irrigation de l’époque ottomane a été mis au jour à la villa Abdeltif du Hamma (Alger) par une équipe de restaurateurs. « Aucun ne s’y attendait. C’est en faisant des travaux dans le Riadh, sorte de maison fermée de cette résidence ottomane, que les ouvriers ont découvert le bassin enseveli sous des tonnes de terre et d’où dépassaient deux arbres géants », insiste M. Zekar, architecte restaurateur et chef de projet. Un puits de 40 mètres de profondeur a été découvert. Il alimentait le bassin à partir duquel sont irrigués les jardins en pente situés en contrebas de la résidence, soutient l’architecte en faisant remarquer que l’arboritorium du Hamma regorge d’eau. Pour lui, l’aqueduc du Hamma, achevé en 1611 prend aussi source quelques mètres plus bas alors que la Bibliothèque nationale et le musée des Beaux-Arts font toujours face au problème d’infiltration d’eau. La ministre de la Culture, Khalida Toumi, et celui des Ressources en eau, Abdelmalek Sellal, ont fait le déplacement dans cette résidence située en contrebas de Riadh El Feth, en souhaitant que l’ouvrage soit classé patrimoine national, d’autant plus qu’il n’en existe aucun de cette dimension au nord du pays. « Les seuls systèmes connus de tous sont les fougaras qui se trouvent au Sud », soutient M. Sellal qui indique que des ingénieurs de l’Institut national de l’irrigation (INRH) prêteront main forte à l’équipe des restaurateurs.

Plus incisive, la ministre relève que le système d’irrigation de ce qui fut la résidence des artistes à l’époque française est d’une « ingéniosité » telle que les Français qui y ont pris pied ont voulu en réaliser un autre mais « ont échoué ». « C’est dire le génie des Algériens de cette époque », affirme Mme Toumi, soulignant qu’il a fallu toute la volonté des restaurateurs pour mettre au jour 70% de l’ouvrage. Construite durant la première moitié du XVIIe siècle, la villa Abdeltif fait partie de ces 120 demeures fahs (extra-muros de la Citadelle), ayant appartenu aux familles de notables de La Casbah, lesquels en ont fait leur résidence d’été. Avec l’arrivée des Français, beaucoup de transformations y ont été entreprises afin d’accueillir les soldats de la Légion et par la suite servir de résidence des artistes. Des travaux de confortement furent entrepris au lendemain du séisme du 21 mai 2003, mais ce n’est qu’en juin 2006 que les travaux de restauration ont commencé réellement dans le domaine de plus de deux hectares.
[ source ]
par Nadir Iddir
El watan - Edition du 13 Avril 2008

lundi 7 avril 2008

Sur les traces de Cervantès à Alger

Beau-livre. Sur les traces de Cervantès à Alger de Waciny Laredj

Un passage universel


L’écrivain Waciny Laredj récidive en consacrant un beau livre intitulé Sur les traces de Cervantès à Alger sur le personnage emblématique de Don Quichotte.


Edité par les éditions Alpha dans le cadre de la manifestation Alger, capitale de la culture arabe, le livre se décline en deux versions, française et arabe. A la lecture de cet intéressant ouvrage, il en ressort que Waciny Laredj semble avoir mis à profit ses recherches et entreprises lors de la publication De la gardienne des ombres, Don Quichotte à Alger, publié par les éditions Marsa en 1996. Comme à son habitué, Waciny Laredj a fait preuve d’une qualité d’écriture exceptionnelle. Avec une subtilité inégalée, l’auteur revient sur le parcours de Miguel Cervantès à Alger. Alors que ce personnage atypique du roman a donné naissance à une littérature universelle, il est quasiment ignoré dans les établissements scolaires algériens, c’est du moins ce que souligne Waciny Laredj. Ce dernier estime qu’après quatre siècles de sa disparition, Cervantès nous renvoie à notre image et à notre mémoire. « Une grande question qu’on ne peut éviter à chaque fois que le nom de Cervantès est évoqué : que peut-on ajouter aux 3700 titres consacrés à Cervantès, répertoriés dans la Bibliografia de la litteratura hispanica de José Simon Dias ? » écrit l’écrivain. Si plusieurs ouvrages ont été édités sur la vie et l’œuvre de Cervantès, il n’en demeure pas moins qu’il existe des zones d’ombres non élucidées ou mal exploitées. Waciny Laredj est convaincu que les seules renseignements sur Cervantès proviennent d’enquêtes successives menées depuis le XVIIIe siècle par les premiers biographes. Les documents en question plongent les potentiels lecteurs dans le silence et dans des non-dits. « Il manque à cet arsenal documentaire une biographie critique digne de ce nom qui décrive l’écrivain dans le temps, le passé mais aussi le présent, puisque Cervantès continue toujours d’exister parmi nous ». A travers le pronom personnel « je », le narrateur se substitue au personnage principal pour revenir sur le parcours et le passage de Don Quichotte à Alger. En guise d’avertissement, Waciny Laredj, précise que refaire le voyage de Cervantès à Alger n’est guère un luxe ou un énième retour à l’histoire des XVIe et XVIIe siècles, « plus que dans tout cela : revivre cette possibilité de rencontre et de partage même quand les temps sont durs. Juste un rappel, presque désespéré, pour un monde qui s’autodétruit sans s’en rendre compte ».

Waciny Laredj- Sur les traces de Cervantès à Alger Edition Alpha. 204 pages. Mars 2008.
[ source ]
par Nacima Chabani
El watan - Edition du 7 Avril 2008

dimanche 6 avril 2008

L’histoire enfouie du Bardo

PATRIMOINE MATÉRIELBardo
L’histoire enfouie du Bardo
Les travaux d’aménagement d’une aile du Musée national ont mis à jour un bassin et une galerie souterraine qui dateraient de l’époque ottomane.

Des pipes en terre cuite, des fragments de céramique et de meule...ont surgi des entrailles de la terre. L’histoire de la villa du Bardo refait surface. Elle ressemble à cette mémoire qui rejaillit d’outre-tombe.
La visite que nous avons effectuée, ce week-end, au Musée du Bardo était aussi inopportune que l’a été la découverte qui a vu le jour il y a pratiquement un mois de cela. Les ouvriers chargés des travaux d’aménagement de la partie supérieure du musée ont, et de manière tout à fait accidentelle et inattendue, participé à la mise à jour d’un bassin et d’une galerie souterraine qui remonteraient à l’époque ottomane.

Le bassin de forme carrée est composé de deux bacs situés à deux de ses angles. Ils auraient eu pour fonction «d’héberger» des plantes aquatiques. En son beau milieu s’érige une vasque qui pourrait avoir servi de socle à une fontaine. Elle aurait apparemment subi quelques transformations puisqu’elle porte des traces d’une pellicule de ciment. Les modifications subies par le bassin dateraient du début des années 1950, selon des informations recueillies auprès d’un ancien gardien du musée du Bardo, aujourd’hui à la retraite.
Sa profondeur a été considérablement réduite pour atteindre quelques dizaines de centimètres, pour des raisons de sécurité, paraît-il, afin d’éviter tout risque de noyade, en l’occurrence aux enfants. Le bassin, qui a retrouvé ses dimensions d’origine, est doté d’un escalier en pierre, à un autre de ses angles. Il permet de descendre avec une certaine aisance à l’intérieur, sa profondeur est désormais évaluée à une bonne hauteur d’homme.
Il est situé en contrebas de la fontaine qui fait face au «diwan», non loin des appartements anciennement réservés à la «favorite». C’est sur ces mêmes lieux qu’a été pratiquée l’ouverture qui permet de livrer un accès à la galerie souterraine.

A l’intérieur de celle-ci, il a été dénombré deux chambres aménagées qui auraient pu servir pour le stockage de foin pour des chevaux. Le tunnel mènerait en effet aux anciennes écuries de la villa du Bardo, il déboucherait aussi sur la salle actuelle réservée à la préhistoire. Cette résidence d’été, avant d’être transformée en superbe musée, a dû changer de mains et de propriétaires à plusieurs reprises.

Ce somptueux monument algérois à l’architecture typiquement mauresque, a vu le jour selon toute vraisemblance au XVIIIe siècle. Son histoire est, cependant, rendue assez imprécise par le manque d’éléments qui font défaut à sa reconstitution.
Ses ornements et sa conception renseignent, par contre, sur l’extraordinaire raffinement recherché de ceux qui n’ont songé qu’à le choyer. L’hypothèse la plus plausible et la plus répandue attribue l’origine de ce joyau architectural à un noble tunisien exilé. Un certain prince Mustapha Ben Omar cité par Henri Klein dans ses feuillets d’El Djazaïr.

Selon certains spécialistes, le «Bardo» serait une déformation qui provient du nom espagnol «Prado». Il renverrait aux somptueux palais des sultans Hafsides qui remonteraient au XVe siècle et dont on retrouve la trace en banlieue tunisienne.
Au tout début de la colonisation française, en 1832, le «Bardo» devint la propriété du général Exel Mens. Ali Bey, Agha de Biskra à qui il fut cédé juste après, s’en sépara à son tour au profit d’un certain Joret, Français d’origine.

La villa du Bardo serait ce type de résidence que les Algérois aimaient à s’offrir. Ses propriétaires eurent le réflexe qui témoigne d’un goût certain pour l’esthétique. Il atteste d’une culture extraordinairement raffinée. L’ex-puissance coloniale en fit l’acquisition à l’occasion du centenaire de la colonisation de l’Algérie. Elle l’érigea en Musée de préhistoire et d’ethnographie. N’ayant pas son égal sur le continent africain, il retrace l’une des plus belles aventures de l’histoire de l’humanité.
[ source ]
par Mohamed TOUATI
L'Expression - Edition du 6 Avril 2008